Alors que le Front national vise plusieurs mairies lors des élections de mars, quel bilan tirer de sa gestion à Toulon,Orange, Marignane et Vitrolles à la fin des années 1990 ?
Une première version de cet article a été publiée en septembre 2012. Nous le republions à l'occasion de notre partenariat avec les Pieds sur terre et de la diffusion du reportage audio à Vitrolles que vous pouvez retrouver ici.
« Une dette française en piteux état après trente ans de cogestion UMP-PS. » Lorsqu'elle présente son « plan de désendettement » et son « chiffrage », en janvier 2012, Marine Le Pen veut mettre en scène un Front national devenu crédible face à des adversaires « dans le flou » et responsables de la crise (voir la vidéo). Le Front national avait déjà tenté de se forger une image de bon gestionnaire à la fin des années 1990. Ce fut un échec cuisant. Aux manettes dans quatre villes du Sud-Est (Orange, Marignane, Toulon, Vitrolles), il avait laissé derrière lui des villes endettées jusqu’au cou et démontré son incapacité à construire un projet social.
Les quatre maires frontistes ont fait de l’assainissement des finances une priorité. Les quatre ont mené « une gestion financière calamiteuse », explique à Mediapart le chercheur Gilles Ivaldi, qui a travaillé sur le Front national au pouvoir municipal (lire notre Boîte noire). Déjà endettées pour certaines, ces villes sont plombées par le FN. Trois d’entre elles sont épinglées par des rapports de la chambre régionale des comptes (CRC) de Provence-Alpes-Côte d’Azur. (…)
Extrait qui ne concernera que la ville d'Orange. Je vous invite donc à lire l'original sur Médiapart
À Orange, Bompard s'est longtemps félicité de sa gestion : baisse des impôts, de l'insécurité, du prix de l'eau, investissements « deux fois supérieurs aux villes de la même strate ». Comme à Vitrolles, le maire a procédé à quelques tours de passe-passe : il oublie de dire que l'insécurité a diminué dans tout le département, et que si l'eau coûte moins cher, c’est parce que la ville n'assure plus l'entretien de la tuyauterie ni les investissements nécessaires.
En octobre 2011, la chambre régionale des comptes pointe des irrégularités et notamment des « dépenses à caractère familial »des époux Bompard : des « factures de restaurant récurrentes »au nom de Marie-Claude Bompard, des nuits d'hôtel, « un séjour à Spa de cinq jours en 2007 », des soins de « vinothérapie, hammam et bain thermal », des factures de parfums de luxe, des cigares et cigarettes, des « cotisations d'assurances personnelles », « des achats de billets de train, d'instruments de musique, de literie, le règlement d'une facture d'électricité pour un enfant, l'achat d'un téléphone Nokia effectué au nom de jeune fille de l'épouse du maire », l'utilisation de « deux véhicules de fonction », etc. Aujourd’hui encore, le maire continue pourtant de défendre bec et ongles sa gestion. (...)
« Pour construire, il faut parfois démolir. »Cette formule de l'adjointe aux affaires sociales d'Orange résume la politique sociale du FN. Comme dans le domaine culturel (lire notre volet 1), les quatre édiles refusent de bâtir sur de l’existant et coupent les subventions à certaines associations. En octobre 1995, Jean-Marie Le Pen convoque d'ailleurs “ses” maires pour les presser d'appliquer cette consigne.
Jacques Bompard apparaît comme « le plus zélé » des maires(dixit un dirigeant du FN). Exemple avec le budget voté en 1996 à Orange. Il augmente les moyens alloués à la sécurité (+ 3 %) et les indemnités des conseillers municipaux possédant une délégation (+ 11 000 euros), mais diminue tout le reste : les fournitures scolaires (– 25 %) ; le sport (– 25 %), la culture (– 230 000 euros), l'aide sociale (– 10 %, soit – 260 000 euros), etc.
Plus de subventions pour les maisons de quartier, « école de la rue dans toute son horreur », selon le maire, ni pour la mission locale, chargée de l'emploi des jeunes. « On leur donnait 300 000 francs à ces braves gens… On ne leur versera plus rien », commente André-Yves Beck, la plume du maire.
L'Opar (Orange prévention accueil réinsertion), Oser, association d'insertion des quartiers Nord, le centre médico-social, disparaissent. La gratuité des salles municipales n'est concédée qu'aux associations qui acceptent que la mairie soit « coorganisatrice » de leurs manifestations. (…)
Des budgets sécuritaires :
(…) La priorité des quatre maires est ailleurs : la sécurité. Tous augmentent le nombre de policiers municipaux (…) À Orange, la police municipale s’installe dans les locaux de la mission locale, qui a mis la clé sous la porte.
Les rapports de la chambre régionale des comptes de PACA
- Marignane (2006)
- Orange (2002)
- Vitrolles (2002)
- Une série de Libération en juin 1998 : « Où en sont les villes gérées par l'extrême droite ? »
Volet 1 : « Vitrolles, le second souffle de la résistance au FN ».
Volet 2 : « Toulon. Les rebelles de l'ombre à la mairie de Toulon ».
Volet 3 : « Marignane: la résistance en friche ».
Volet 4 : « À Orange, le FN se fond dans l'ordinaire ».
- « Mains brunes sur la ville », documentaire sur Orange et Bollène, villes des époux Bompard, par Bernard Richard et Jean-Baptiste Malet (2012). Bande-annonce ici.
Orange
- « Orange »: la poigne du FN dans un gant de velours », article de Libérationdu 26 janvier 1996.
- « Le système Bompard à Orange », enquête de L'Express du 25 juillet 2002.
- « Jacques Bompard quitte le MNF de Philippe de Villiers », article du Figaro du 29 janvier 2010.
Le FN et la culture :
Orange
- Reportage de France 2 sur la censure dans les bibliothèques, le 11 juillet 1996 : à voir ici.
- « Orange, le "grand ménage" du FN », article de Libérationdu 25 octobre 1995.
- « L'enjeu des Chorégies », article de L'Express du 12 octobre 1995.
- « La culture FN laisse Orange amère », article de Libération du 20 octobre 1995.
- « Rayon FN à la bibliothèque d'Orange », article de Libération du 14 septembre 1996.
- « Le maire FN d'Orange menace les Chorégies », article de Libération du 18 novembre 1996.
- « Orange : le rapport qui dénonce la censure FN », article de L'Express du 11 juillet 1998.
Les affaires et le clientélisme dans les villes FN :
Orange
- « La mairie FN nettoie Orange par la peur », article de Libérationdu 12 juin 1996.
- « Un père Fouettard à la mairie d'Orange », article de Libérationdu 16 août 1995.
Les gestions financières des villes FN
- « Jacques Bompard épinglé par la chambre des comptes », article de Libération du 18 octobre 2011. Lire l'article en entier sur Médiapart
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