En 2009, des émeutes éclatent après les élections présidentielles en Iran. Des dizaines de morts, dont une jeune fille du nom de Neda qui deviendra l'emblème de cette révolte populaire.
Toutefois, le régime autoritaire du président Ahmadinejad tient bon. Encore une fois, les ayatollahs secondés par les Gardiens de la révolution démontrent leur mainmise sur le pouvoir iranien. Pour combien de temps?
Au début janvier de cette année, c'est en Tunisie que le ras-le-bol populaire éclate, à l'annonce du décès d'un jeune homme, Mohamed Bouazizi, qui s'était immolé par le feu pour protester contre un abus policier. Par ricochet, cette mort est devenue le symbole de l'oppression du peuple tunisien qui est alors descendu dans la rue.
On a cru que le président du pays s'accrocherait au pouvoir, mais contre toute attente, Ben Ali et Madame son épouse, une croqueuse de diamants, filent à l'anglaise en Arabie saoudite, où le régime est encore plus totalitaire qu'en Tunisie. Ils ne seront pas trop dépaysés.
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Les échos de la liberté retrouvée par les Tunisiens résonnaient encore à nos oreilles quand un tohu-bohu cacophonique nous parvient du Caire, en Égypte.
Un autre ras-le-bol d'un autre peuple épuisé de subir un régime politique autoritaire et antidémocratique. Le monde entier est assis sur le bord de sa chaise. On attend. On espère.
Au moment où j'écris cette chronique, on attend toujours. Une «marche du million» (de personnes) se déroule au Caire et dans plusieurs villes du pays pour exiger le départ du président Moubarak.
En guise de réponse, Moubarak annonce qu'il ne se représentera pas à la présidence aux prochaines élections. Mais pendant combien de jours pourra-t-il encore s'accrocher à un pouvoir qui lui a déjà échappé de toute façon, comme l'atteste l'échec d'un couvre-feu dont personne ne tient compte? Surtout que l'armée, dont il est issu, a indiqué qu'elle ne tirerait pas sur la foule, signalant ainsi qu'elle ne désavoue pas totalement la révolte populaire, même si elle est toujours, officiellement, pour l'instant, fidèle au Raïs.
Et ensuite? D'où nous parviendront les échos d'une nouvelle révolution dans le monde arabo-musulman?
Au Yémen, en Algérie, en Jordanie, en Syrie les citoyens sont aussi descendus dans la rue, ou prévoient le faire, pour protester contre l'étau des régimes politiques de leurs pays. Certains dirigeants, constatant que la grogne se répand comme une tache d'huile, ont annoncé des remaniements ministériels ou des accommodements politiques pour tenter de calmer le jeu, mais il y a fort à parier que si la lame de fond qui s'annonce n'est pas stoppée, c'est un tsunami politique qui frappera les pays arabo-musulmans.
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Vus d'ici, ces soulèvements sont fascinants. Ils semblent jaillir de nulle part, et ça nous étonne à chaque nouvelle éruption de colère.
Notre étonnement est un signe évident que nous ne nous préoccupons pas outre mesure de ce qui se passe dans ces pays, et que nous nous intéressons peu à leurs habitants, à leurs dirigeants, à leurs régimes autocratiques. Sinon, nous ne serions pas aussi étonnés!
Alors, quand la révolte apparaît au grand jour, nous forçant à voir ce qui s'y passe, nous enfilons nos oripeaux de grands démocrates pour crier à qui veut bien l'entendre notre aversion profonde pour ces odieux tyrans.
Sans oublier d'agonir nos propres gouvernements «démocratiques» d'avoir toléré ces dictateurs et d'avoir frayé avec eux.
Pensons à la Birmanie, la Libye, la Syrie, le Pakistan, le Zimbabwe, la Corée du Nord, Cuba, le Soudan, la Chine, pour n'en citer que quelques-uns, où le pouvoir a été confisqué par des dictateurs. Ça n'empêche pas les autres chefs d'État ou de gouvernement de les accueillir en grande pompe lors de rencontres au sommet, telles que celles du G-20, du Commonwealth, de la Francophonie, de l'OUA, de l'ASEAN, de l'OEA. Ou à leur réserver des places de choix aux rencontres de Davos, du FMI, de l'OCDE, de la Banque mondiale, de l'OMC, de l'OMS, de l'UNESCO. Même l'ONU leur déroule le tapis rouge! (…)
Source CapAcadie/ Par Rino Morin Rossignol