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Républicaine donc de Gauche, parce que "capitalisme, libéralisme,mondialisation économique" sont antagonistes avec notre devise "liberté, égalité,fraternité" ;la déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen ; le préambule de la constitution de 1946 ; la déclaration de Philadelphie et le Conseil National de la Résistance.
La Commission européenne vient d’autoriser l’importation et la commercialisation sur le territoire européen de 19 OGM produits par les multinationales Monsanto, Bayer, Dupont et BASF destinés à l’alimentation animale (notamment soja) et humaine. Elle confirme ainsi sa soumission aux lobbies des multinationales des OGM.
Dans le même temps, la Commission européenne propose que les Etats membres puissent interdire la commercialisation de ces OGM sur leurs territoires. Il s’agit d’un leurre : les pays qui le feraient n’auraient, dans le cadre des règles actuelles de l’Union européenne, aucun moyen d’empêcher la concurrence sur leur propre territoire de produits animaux fabriqués avec des OGM dans d’autre pays. De plus, ils se mettraient dans une fragilité juridique par rapport à des attaques auprès de l’OMC de pays exportateurs, fragilité encore accrue en cas de signature du traité de libre échange transatlantique TAFTA.
Pour le Parti de Gauche, les règles européennes actuelles sont inacceptables et doivent être dénoncées par la France. Celle-ci doit non seulement interdire l’importation d’OGM sur son territoire –quelqu’en soit l’origine, y compris donc en provenance des autres pays de l’Union européenne-, mais également interdire les importations de produits animaux issus d’élevage utilisant des végétaux OGM pour l’alimentation du bétail. La France doit par ailleurs s’opposer à la signature du traité de libre-échange transatlantique. Par Laurent Levard / Parti de Gauche
« La France serait contente que quelqu’un force le Parlement, mais c’est difficile, c’est la démocratie » s’est lamenté depuis Washington le numéro deux du gouvernement allemand, Wolfgang Schaüble. Il a livré au passage les noms des traîtres qui conspirent contre la souveraineté de leur patrie : Sapin et Macron, ses « amis français » qui lui racontent « de longues histoires » sur leurs difficultés en France.
Se faisant il encourage Valls qui a amorcé ce viol de la démocratie en utilisant le 49-3 contre les représentants du peuple. Le principal soutien de la politique d’austérité du gouvernement se trouve désormais outre-rhin. Et Hollande a manqué encore une fois à ses plus élémentaires devoirs de défense de la souveraineté de la France en n’exigeant pas des excuses publiques du gouvernement allemand.
La déclaration de Schaüble est aussi un hommage plus lointain rendu à Bismarck. Ce chancelier luthérien-conservateur, comme Merkel, avait déclaré en 1862 : « ce n’est pas par les discours et les votes à la majorité que les grandes questions de notre temps seront décidées mais par le fer et le sang. »
Une chose est commune aux maux qui accablent la France et plus largement l’Union européenne (réformes des hôpitaux, « libéralisation » du marché du travail, hécatombes aux frontières) : le fer de l’austérité. C’est parce que chaque action passe sous la férule de vérificateurs européens austéritaires que se construit la distance avec l’humain d’abord.
Jusqu’à l’indifférence pour la mort de masse en méditerranée. Avec plus de 1 500 morts en 3 mois, on atteint un bilan digne d’une guerre. Pourtant nulle coalition internationale ne s’est dressée pour y répliquer. Tout juste un sommet européen est-il convoqué.
L’indifférence est ici le masque de la culpabilité. Car l’Europe a bien une responsabilité globale dans cette catastrophe. Pour avoir délibérément concentré ses moyens sur la protection des côtes plutôt que le sauvetage en mer. Mais aussi pour avoir mené des opérations militaires qui ont détruit plusieurs États dont sont issus les migrants : Libye, Mali et Somalie. Et pour avoir affamé l’Afrique en libéralisant de force son agriculture.
Sous la domination allemande, l’ordre européen est devenu meurtrier à l’intérieur et à l’extérieur. S’en libérer devient une nécessité historique pour les peuples. S’ils veulent survivre. Laurent Maffeïs / Parti de Gauche
Revenez un instant dans le temps pour imaginer Jaurès défenseur de la paix. L’Histoire lui a donné ce titre mais on peut parier que pour la meute de son époque c’était un défenseur de
l’empire germanique. Il ne manquait pas de raisons « progressistes » pour s’opposer au Kaiser, autocrate honni du pays des droits de l’Homme. Il a fallu ce climat de vindicte médiatique pour que le jeune Raoul Villain passe à l’acte et qu’il soit acquitté cinq ans plus tard. Le grand méchant de notre époque a changé. Dorénavant, c’est l’empire russe de Vladimir Poutine, nouvelle incarnation du mal. Le rôle de Jean Jaurès est tenu par Jean-Luc Mélenchon.
La Russie justifie une guerre européenne contre « l’Occident » qui tombe à pic pour les amoureux de la diplomatie étasunienne. Comme dans les années 10, l’extrême-droite est utilisée pour faire le sale boulot. La haine ethnique est utilisée à Kiev et à Paris. Surtout quand les politiques d’austérité sont remises en cause par le mouvement des peuples. Comme on l’a vu dans cette semaine où ont coexisté une marche intersyndicale monstre, tue par les médias, et une affaire de la famille Le Pen, montée en épingle par ces mêmes médias.
Manuel Valls joue le rôle d’un Daladier. Une semaine décisive pour la Grèce ne lui arrache pas le moindre commentaire, occupé qu’il est à son Congrès et à faire voter l’ultralibérale loi Macron, ainsi que l’ultra sécuritaire loi sur le renseignement.
Mais si Jean-Luc Mélenchon joue le rôle d’un Jean Jaurès, les invectives et les propos calomnieux contre lui vont avec. François Delapierre Parti de Gauche
Les états membres de l’UE, sous la responsabilité d’Europol et FRONTEX, ont organisé une nouvelle quinzaine de chasse aux demandeurs d’asile et plus généralement aux migrants. Dans la continuité de l’opération Mos Maiorum d’Octobre 2014, la nouvelle traque, nommée Amberlight 2015, s’est déroulée du 1er au 14 Avril 2015 avec des objectifs fixés par le Conseil de l’UE. Cette opération de grande envergure prévoyait d’intercepter et collecter les données personnelles de nombreux migrants et réfugiés en quête de meilleures conditions de vie ou de protection internationale afin d’organiser leur expulsion d’Europe.
Le rapport de l’ONG Statewatch sur l’opération Mos Maiorum avait déjà mis clairement en évidence le profilage racial et les contrôles au faciès des opérations policières. Amberlight a poursuivi les objectifs nauséabonds du Conseil de l’UE en matière de politique migratoire, visant à stigmatiser chaque jour un peu plus les demandeurs d’asile et les migrants.
Si la politique d’immigration répressive menée par les états membres de l’UE et FRONTEX ne contribue pas à réduire les flux migratoires, elle ne vise pas non plus à secourir les migrants, comme en témoigne le naufrage en Méditerranée du week-end dernier. Selon les survivants, près de 400 migrants auraient encore disparu dans le naufrage de leur embarcation, alors que près de 42 embarcations et 8 000 personnes auraient déjà été secourues. Si ces chiffres sont confirmés, ce serait l’un des pires naufrages en Méditerranée, s’ajoutant aux plus de 23 000 migrants morts en mer ces dix dernières années aux portes de l’Europe, sans compter les morts aux frontières terrestres du sud de l’Europe, notamment en Bulgarie, comprenant également des enfants.
Le Parti de Gauche dénonce fermement cette Europe forteresse, qui criminalise les migrants avec FRONTEX et qui conduit à l’accumulation des naufragés et des cadavres à nos frontières. Ces politiques migratoires, alors que l’Union Européenne n’aurait pas de difficulté à intégrer les migrants, se fondent sur une approche sécuritaire et l’externalisation des contrôles migratoires qui doivent cesser !
Nous exigeons l’arrêt des traitements discriminatoires à l’égard des demandeurs d’asile et des migrants !
L’UE et ses états membres doivent enfin ratifier la Convention internationale relative à la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, à laquelle leur statut d’être humain leur donne le droit ! Par Elisabeth Cazenave, responsable de la commission Migrations et Sophie Rauszer et Franceline Métayer, coresponsables de la commission Europe / Source Parti de Gauche
M. Jean-Christophe CambadélisPremier secrétaire du Parti Socialiste10 Rue de Solférino75007 Paris
Paris le 31 mars
Monsieur le premier secrétaire,
Votre directeur adjoint de cabinet a bien voulu nous proposer par un mail de trois lignes ce
lundi soir une rencontre dans le cadre des « consultations » avec les formations de gauche, que vous pensez nécessaire après votre terrible défaite. Nous avions entendu parler de cette initiative dans la presse la semaine dernière et, bien que cette invitation soit lancée en dernière minute et avec une désinvolture qui signale votre désarroi, nous sommes sensibles au fait que vous ayez distrait le temps précieux de votre directeur adjoint pour nous adresser ce message.
Nous allons cependant la décliner. Le résultat des élections départementales est sans appel : une abstention qui reste massive, une victoire écrasante de la droite, l’enracinement du FN, une déroute de votre parti et de ses alliés que ne parvient malheureusement pas à contrebalancer la bonne tenue des candidatures citoyennes qu’avec nos amis du FDG, et souvent ceux d’EELV, nous avons proposées dans le pays.
Durant cette élection vous n’avez, personnellement, pas cessé d’appeler à une unité factice de la gauche derrière la politique du gouvernement, pour faire obstacle à la montée de la droite et de l’extrême-droite. Cette tactique du « vote utile » a échoué. Le tripartisme est une fiction médiatique : avec une gauche d’opposition à environ 11 % en moyenne nationale et une abstention à 50 %, elle est même un déni démocratique. Bien sûr, vous pouvez continuer à mépriser ce fait. Cela vous a déjà beaucoup réussi.
Aujourd’hui, vous nous proposez d’entretenir cette illusion. Vous nous proposez en réalité de préparer 2017 en nous ralliant derrière la politique de votre gouvernement. Or, non seulement Manuel Valls a annoncé la poursuite de cette politique mais nous savons qu’elle va même s’aggraver. Sur ordre de Bruxelles et de Berlin, s’annonce une loi Macron 2. Elle est pire encore, en termes de dérégulations et d’attaque des acquis du monde du travail que l’actuelle loi Macron dont nous continuons à combattre l’adoption définitive. Malgré le passage en force du 49.3 à l’Assemblée nationale, nous ne perdons pas espoir de vous faire reculer. Nous soutenons notamment les organisations syndicales lors de la grande journée d’actions du 9 avril contre votre politique. Pour passer sous les 3% de déficit en 2017 vous avez accepté 30 milliards d’économies supplémentaires imposées par la Commission européenne, en plus des 50 déjà votées. Vous savez comme nous que François Hollande a déjà accepté une réduction des dépenses publiques de 4 milliards rapidement. Par ailleurs, la fuite en avant du gouvernement dans les mesures les plus anti-écologiques (agriculture, transports, grands projets inutiles imposés…) est à contre-courant de l’intérêt général humain, alors que 2015 devait au contraire être une année de grande mobilisation contre le changement climatique , d’autant que nous accueillerons en décembre la COP21.
Quant à votre politique d’immigration, difficile d’y voir des différences avec celle menée par le gouvernement précédent, sans oublier l’abandon une fois de plus de l’engagement du droit de vote aux élections locales pour les résidents étrangers.
Vous comprendrez bien, dès lors, qu’il est inutile de faire semblant. Nous respectons la volonté de tous nos concitoyennes et concitoyens qui refusent cette politique des apparences et demandent avant tout de la clarté. Il est inutile de venir à votre siège pour vous dire notre refus d’assumer pareille politique.
Toutefois, si le Parti socialiste venait, à l’avenir, à proposer une alternative au pays contestant l’actuelle politique gouvernementale faite d’austérité, de politique de l’offre, de productivisme, de soumission à Mme Merkel et à M. Juncker et de maintien de la 5e République, nous serions évidemment prêts à vous rencontrer. Ce serait une très bonne nouvelle pour notre pays qui souffre a cause de vous.
Dans cette attente, je vous prie de croire, Monsieur le premier secrétaire, à nos sentiments militants.
L’écho de la victoire de Syriza le 25 janvier n’en a pas fini de résonner. Le gouvernement d’Alexis Tsipras a mis en place une stratégie de désobéissance européenne : d’une part des
décisions unilatérales qui rompent avec les « engagements » imposées par la Troïka, de l’autre la proposition de renégociation de la dette avec Bruxelles en interpellant les gouvernements européens. Car, fait inhabituel pour les peuples habitués à ce que la gauche soit défigurée par les renoncements des socio libéraux, le gouvernement Tsipras applique son programme ! Le soir même de sa victoire, Alexis Tsipras annonçait la fin de la Troïka en Grèce, l’arrêt de l’application du mémorandum, la reconquête de la souveraineté et de la dignité du peuple grec et l’engagement du combat contre l’oligarchie. Les actes ont suivi. En une semaine, le gouvernement de Tsipras a rehaussé le SMIC comme prévu, mis fin aux privatisations de l’électricité et du Pirée plus d’autres mesures sociales dans les universités sans oublier l’établissement d’un droit du sol sur les enfants de migrants. Vendredi dernier au conseil des ministres, Tsipras a annoncé la sortie unilatérale du mémorandum.
Les réactions sont restées, un temps, prudentes de part et d’autre. Mais c’est finalement la BCE qui a ouvert les hostilités mercredi 4 février. Elle a annoncé la coupure de liquidités en faveur de la Grèce. Ce coup de force d’un organisme non élu et indépendant du pouvoir politique vis à vis d’un gouvernement dont la légitimité repose sur le suffrage universel, avant même qu’une quelconque institution européenne représentative ne se soit exprimée, résume le caractère a-démocratique de l’UE. Quoi qu’il en soit, la Troïka a clairement engagé la bataille contre le gouvernement grec. Avec, évidemment, l’appui (les ordres ?) empressé de l’Allemagne puisque dès jeudi, lors d’une rencontre bilatérale, le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble a confirmé son désaccord à son homologue grec à la fois sur la politique menée à Athènes et sur un réaménagement de la dette. La Grèce est donc appelé à se soumettre ou, implicitement, à en tirer les conséquences en sortant de la zone Euro. Tout cela révèle l’inanité d’une construction européenne sordidement définie par Junker : « Il ne peut y avoir de choix démocratiques contre les traités européens ».
Comme Chypre précédemment, la Grèce est donc sommée d’obéir aux ordres de Bruxelles et de Berlin. Ils prennent ainsi le risque d’une déflagration généralisée. Car le gouvernement de Tsipras ne cédera pas, pas plus que nous le ferions demain si nous gouvernions le pays. De visite à Paris, Tsipras a demandé le soutien de François Hollande. Celui-ci est aux pieds du mur. Il ne pourra pas longtemps jouer les équilibristes : d’une part affirmer son accord avec le Premier ministre grec pour que l’Europe évolue vers une politique plus solidaire et tournée vers la fin de l’austérité, d’autre part expliquer que les règles européennes et les engagements pris devront être respectés par la Grèce. Il va falloir choisir, au risque d’un grand écart et au final d’une soumission supplémentaire devant l’Allemagne. Répondant à l’appel de nos camarades grecs engagés dans ce bras de fer historique, nous interpellons François Hollande pour qu’il choisisse le soutien au peuple grec et somme la BCE de revenir sur ses positions.
Mais nous sommes animés de bien peu d’illusions en la matière : ce sera une bataille que seule la mobilisation des peuples peut gagner. Car la Grèce n’est pas isolée. C’est la même camisole austéritaire, le même déni de la souveraineté populaire qui enserrent tous les peuples de l’UE et les rend ainsi potentiellement solidaires.
C’est pourquoi notre première tâche va consister à organiser dans la rue la solidarité avec le peuple grec et son gouvernement. Il faut très vite une grande marche si possible en parallèle dans toutes les capitales européennes. Syriza a ouvert la voie, à nous maintenant de pousser derrière en exigeant le moratoire sur la dette grecque et la convocation d’une conférence européenne sur les dettes souveraines. A nous également d’en nourrir le contenu : non pas l’aménagement à la marge mais la fin des traités actuels, un audit sur les dettes souveraines, l’exigence d’une BCE prêtant directement aux états, etc… Car plus que jamais il faut rompre si on veut espérer refonder une autre Europe.
D’autant qu’il y a l’espoir que rapidement un deuxième pays casse à son tour la chaine de l’austérité. C’est évidemment vers l’Espagne que nos regards se tournent. L’Espagne où nous étions avec Jean-Luc Mélenchon samedi dernier à la première grande démonstration de rue de Podemos. Elle a constitué une flamboyante réussite. Incontestablement la victoire de Syriza a crédibilisé la possible accession au pouvoir des forces anti-austéritaires. Il faut désormais en profiter. Organiser le soutien au peuple grec est aussi se donner une chance pour la France. Éric Coquerel
Même s'il y a eu plusieurs «Charlie», pour nous, au Parti de gauche, ils restent de notre famille, une gauche fidèle à elle-même, subversive et iconoclaste.
Le nouveau numéro de Charlie paru ce mercredi est pour moi l’occasion, au-delà du symbole planétaire qu’est devenu le #JeSuisCharlie, de revenir sur les huit jours écoulés. De revenir une semaine en arrière, ce mercredi 7 janvier, qui paraît déjà si loin tant les jours qui ont suivi ont pesé bien plus lourd que leur réalité calendaire. Ce mercredi-là, en fin de matinée, à la lecture d’un premier tweet annonçant une attaque à l’arme automatique dans les locaux de Charlie, j’avoue quelques secondes avoir cru à une blague du journal. Un humour du type de la célèbre une «Bal tragique à Colombey : 1 mort» auto appliquée. Dans ma génération, je ne crois pas être le seul.
Quelques minutes plus tard, sans plus d’informations que la confirmation de tirs et de probables victimes, j’avançais déjà vers le journal dont je suis voisin de quelques centaines de mètres. Ce qui prédominait alors ? Juste le besoin de me rapprocher des «miens», sans même trop savoir, à ce moment-là, comment ce réflexe solidaire pouvait s’exprimer. La suite, le monde entier désormais la connaît. Sur place, à l’intérieur du cordon sécurisé, on a tenté à quelques-uns de se réconforter comme on pouvait en refusant les noms des victimes qui tombaient les uns après les autres. Non pas lui, pas eux…
«Eux», ce sont donc, ce 7 janvier, encore les «nôtres». Ils n’appartiennent pas encore à des millions de personnes dans le monde. Ils sont de notre famille, une gauche restée fidèle à elle-même, subversive et iconoclaste. Je sais, il y a eu plusieurs Charlie dans l’histoire. D’ailleurs, à notre image, Charlie n’a jamais été un. Et, depuis le 7 janvier, je n’ai de toute façon pas envie de faire le tri. Charlie Hebdo c’est, dans les années 70, l’un de mes repères dans un engagement personnel plutôt alors d’essence libertaire. J’ai grandi politiquement avec lui, avec ses éditorialistes, Cavanna en tête, et ses dessinateurs comme avec Cabu, Wolinski ou Gébé. Pas toujours d’accord mais ce n’était pas le but recherché.
S’il y avait, s’il y aura j’espère, une ligne directrice dans ce journal c’est bien le droit de contester et se moquer de tous les pouvoirs, y compris religieux quand ils redeviennent menaçants pour notre liberté de conscience si ce n’est de vivre. Une manière, comme chantait Ferré, de dire «avec un air anar, qu’y a du soleil sur la façade». Contre tous les obscurantismes donc, d’où qu’ils viennent. Charlie c’est aussi beaucoup de camarades dont Charb parce que des rédac chefs appuyant, poing si bien élevé, la candidature de Jean-Luc Mélenchon et le Front de gauche il n’y en a pas tant que cela. Mercredi 7 janvier, en attaquant Charlie, «nous» avons eu ainsi la sensation profonde d’être nous-mêmes d’abord attaqués, comme le furent il y a quelques mois les dirigeants du Front populaire tunisien, avant que tout le peuple français, ou presque, ne réagisse à l’unisson.
Ils se sont trompés
Depuis, je ne peux m’empêcher de penser que les morts de Charlie ont rendu un sacré service au pays même si on eût tant voulu qu’ils ne nous le rendent jamais. C’est en partie parce qu’ils ont été les premières victimes que la pente prise a été fraternelle plutôt que haineuse. Bien sûr, la houle qui s’est mise en mouvement à cette occasion puise son énergie dans le caractère encore profondément républicain de notre pays, mais l’histoire et ses pulsions ne sont jamais écrites. En plein déferlement Lepeno-Zemmourien, alors que le matin même Houellebecq, invité spécial de France Inter, voyait crédibilisée sa fiction délirante – «la France, un Etat Islamiste ? Houellebecq l’anticipe seulement de dix ans», a pu dire un auditeur sans aucune contrepartie d’un journaliste – le profil des victimes a sans doute fait dévier la semaine dans la bonne direction. Profondément peinés, ce sont d’abord ceux qui partageaient l’humanisme de Charlie qui ont réagi et donné le la.
Désireux d’alimenter la peur et le feu du choc des civilisations, les tueurs djihadistes, ou leurs commanditaires, se sont, du point de vue de leurs objectifs, profondément trompés. Le reste c’est la réalité de notre pays qui a fait dévier leur logique folle. Alors qu’ils voulaient trier leurs cibles, journalistes de Charlie, policiers, juifs en les distinguant du reste de la population, ils ont achevé Ahmed Merabet, un policier de religion musulmane et vu dans l’Hyper Cacher un Malien, lui aussi musulman, Lassana Bathily, sauver plusieurs clients juifs en les cachant dans une chambre froide. Ce ne sont pas des petites histoires, c’est l’histoire de la France condensée en quelques jours qui fait que nous avons tous pu nous sentir dimanche si aisément à la fois journaliste, très à gauche, «flic» et juif.
La suite sera difficile à n’en pas douter. Dès samedi, par l’entremise de plusieurs des chefs d’Etat invités par François Hollande, une partie du monde politico-médiatique a tenté de récupérer l’événement : la France devrait enfin se rendre à l’évidence qu’elle est entrée pour de bon cette fois dans la guerre entre le monde démocratique et «occidental» contre la barbarie, le bien contre le mal, assimilant évidemment au mal tout ce qui n’est pas le paradis de l’Otan, de l’Europe libérale et de la Troïka. On voit bien la suite, elle a commencé à apparaître : mardi à l’Assemblée nationale, Manuel Valls s’est empressé de lier l’hommage des députés au vote de la poursuite du funeste engagement militaire de la France au Moyen-Orient. Une politique guerrière qui, dans la lignée de celle engagée par les Etats-Unis en Irak au début du troisième millénaire, n’a fait que multiplier dans le monde les foyers intégristes. Bien peu Charlie dans l’esprit… La suite sur Libération