Interview du président du parlement européen sur le rôle de l'institution et la crise.
La Tribune- Le sentiment général est que le parlement européen est resté plus spectateur qu’acteur dans la crise européenne. Partagez-vous cette vision ?
Martin Schulz - Non, le parlement européen n’est pas resté spectateur. En réalité, c’est l’éternel problème du parlement: ses pouvoirs sont beaucoup plus importants que ce que lui accorde la perception publique. Lorsque le parlement vote en faveur de la taxe sur les transactions financières, cela est beaucoup moins remarqué que lorsque les chefs d’Etat –qui ne sont pas parvenus à se mettre d’accord pendant des mois sur ce thème– évoquent ce sujet. Je pourrais faire une longue liste des initiatives qui prouve le rôle actif du parlement : le Six-Pack ou l’actuel travail sur la régulation des agences de notation.
Mais alors, comment expliquer cette perception ?
Nous avons un rôle actif, mais nous ne pouvons contraindre les gouvernements. Or, les chefs d’Etats et de gouvernements ne manquent jamais de s’occuper de chaque dossier et de s’autoproclamer le gouvernement de l’Europe. Et en agissant ainsi, ils réintroduisent le principe de l’unanimité. Ceci conduit à une stagnation et à la mise en place de solutions qui ont en réalité plutôt conduit à aggraver la crise.
Récemment, sur la nomination d’Yves Mersch au directoire de la BCE, le conseil a désavoué le parlement européen. Le regrettez-vous ?
L’Union européenne n’est pas un Etat fédéral. Si c’en était un, le gouvernement serait responsable devant le parlement. Mais aujourd’hui, c’est optionnel: lorsqu’il s’agit de surveiller les budgets nationaux, on agit comme si l’on était un gouvernement fédéral. Et lorsqu’il s’agit de respecter les choix du parlement, on rappelle que l’UE n’est pas un Etat fédéral. En refusant la décision parlementaire sur la nomination d’Yves Mersch, le conseil européen était dans son droit. Mais il ne devra pas s’étonner si le parlement répond en utilisant un jour le droit de bloquer une de ses décisions. La suite sur La Tribune