Deux policiers, auteurs de livres qui leur ont valu une mise en cause pour manquement à l'obligation de réserve, interpellent le chef du gouvernement. Le premier, le commandant Philippe Pichon, est l'auteur du Journal d'un flic (Flammarion, 2007). La seconde, l'adjoint administratif Sihem Souid, a publié cet automne Omerta dans la police (Le Cherche Midi).
«Si nous nous adressons directement à vous, Monsieur le Premier ministre, c'est que, dirigeant la politique de la Nation, et disposant pour ce faire de l'administration (art. 20 de la Constitution), vous êtes l'organe majeur de l'appareil administratif de l'État. Ce faisant, vous avez compétence pour assurer le bon ordre qui doit régner dans notre démocratie pour que la continuité normative de l'État soit assurée.
Cette responsabilité exclusive dans la conduite de la politique de la Nation entraîne également l'existence d'une responsabilité politique, exercée constitutionnellement devant le Parlement, bien plus sûrement que devant le président de la République.
La dignité humaine est une valeur fondamentale de notre société qui mérite à ce titre la protection du Droit. Il est malgré tout difficile de définir précisément la dignité qui apparaît plutôt comme une notion permettant d'en englober de nombreuses autres. On peut, en conséquence, porter atteinte à la dignité de nombreuses façons. Ce qui semble pouvoir faire l'unité de la notion de « dignité », c'est en réalité la notion même « d'humanité ». Porter atteinte à la dignité d'un individu, c'est nier son caractère d'être humain.
En ce sens, Monsieur le Premier ministre, les atteintes portées à deux policiers à travers le rôle qu'ils remplissent dans la République des citoyens, en leur déniant ce rôle par exemple, peuvent aussi réaliser une grave atteinte à la dignité de ces fonctionnaires.
En effet, l'un (commandant de police) et l'autre (adjoint administratif) sommes aujourd'hui accablés par des procédures contentieuses, dont le but véritable d'atteindre à notre dignité sociale permet à certains de nos chefs de lâcher des coups dirigés en réalité contre notre statut de policier républicain, impartial et diligent.
Les agissements répétés et insistants du ministère de l'Intérieur, sous la tutelle de M. Hortefeux, ont eu pour objet et pour effet une dégradation de nos conditions de travail telle qu'elle compromet gravement notre avenir professionnel. Or, nul ne peut apporter aux droits des personnes au travail et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché, si l'on en croit quelques décisions du Conseil constitutionnel.
20 Décembre 2010 Par Les invités de Mediapart/ Philippe PICHON, commandant de police, Sihem SOUID, adjoint administratif La suite